Retenir la grâce.

Réflexion, Saint Jean de Montmatre, Paris, gildalliere, 2019
Photo/Gilles Dallière/Saint Jean de Montmartre/Paris

En attendant la fin du monde, de mon monde il va sans dire, je suis pour un temps à l’abri, protégé du vent et des éléments, à promener mon Leica dans la reflexion d’un rayon de soleil automnal entre deux portes vitrées, partageant la même quiétude heureuse que celle d’un gâteau sec dans une boîte en fer-blanc.

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Retenir la grâce.

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Nous les arbres.

Fondation Cartier, Nous les arbres, Paris, gildalliere, 2019
Photo/Gilles Dallière/Fondation Cartier/Exposition/Nous les arbres/12 juillet-10 novembre 2019

À la Fondation Cartier, je me demande si ma mémoire n’est pas pleine d’arbres et de voyages. À l’étage je trie les livres, les photos, les textes, des piles de choses devenues inertes et innervées et en clapotant sur les toits de tant d’images fugaces, j’entretiens spontanément celle des arbres en mouvement dans cette installation sculpturale et transparente qui, de l’extérieur vers l’intérieur, est d’une étonnante complexité. Un jeu de transposition formelle qui brouille les frontières entre le monde végétal et l’architecture.

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Nous les arbres.

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Le fils de Caïn.

Sépulture d'Otto Klaus Preis, sculpture de Paul Landowski, cimetière de Montmatre, gildalliere, 2019
Photo/Gilles Dallière/Sépulture Otto Klaus Preis/ Sculpture Paul Landowski/Jabel, le pasteur qui scrute l’horizon/Les fils de Caïn 1906 bronze

L’allemand Otto Klaus Preis s’installe à Paris à la fin des années 1950 pour rejoindre la maison Nina Ricci où il entre comme dessinateur. De la haute couture à l’amour de l’art, il n’y a qu’un pas, franchis en 1972 quand il achète l’hôtel particulier de la nouvelle Athènes. Ce lieu d’exception deviendra l’écrin de sa collection vouée à différents artistes de la seconde moitié du XIXe siècle. À sa mort, en 2003, un jeune homme de bronze marche sur sa sépulture d’un pas résolu, la tête aimantée par la cime des marronniers du cimetière de Montmartre. Dans ce brouillard de cendres, sa virilité s’est perdue dans la contemplation d’elle même, et c’est l’azur du ciel qui colore sa course, vert-de-gris, vers l’avenir. Dans les décombres de la mort, le corps magnifique de la statue de Paul Landowski, s’expose à l’indifférence des cieux.

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Le fils de Caïn.

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Le silence luxueux de l’amphithéâtre.

l’hôtel de la Bûcherie, la compagnie des Philanthropes, oeuvre de Melik Ohanian, Paris, gildalliere, 2018
Photo/Gilles Dallière/Hôtel de la Bûcherie/Paris

Tout est confus dans l’amphithéâtre de l’hôtel de la Bûcherie, dénoyauté de ses bruits et de ses applaudissements. Le pendule de Melik Ohanian réinvente l’espace. S’ajoute à la lumière, le silence luxueux d’une architecture magistrale. Le reflet percé dans l’étage supérieur, bordé d’une balustrade de fer forgé, permet la communication verticale, et au faîte de cette verticalité, l’œuvre surdimensionnée diffuse une image irréelle.

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Le silence luxueux de l’amphithéâtre.

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L’ombre et la lumière.

L'ombre et la lumière, Niki de Saint Phalle, Centre d'art la Malmaison, Cannes, gildalliere, 2019
Photo/Gilles Dallière/Niki de Saint Phalle/Ombre et lumière/La Malmaison/Cannes

“À travers les images, je piétine mon père, je l’humilie de toute mes forces et je le tue”.
Ce qu’une femme a fait, seule une femme peut le défaire.
De l’une venait toute consolation, (Jackie, 1965).
De l’autre, en arrière-plan, vient l’inconsolable, (Daddy : Crucifix, 1972).
À Cannes, la Malmaison et la Villa Domergue mettent en lumière les tourments de Niki de Saint Phalle. C’est l’amer et le suave. Deux gestes dans le même geste. Celui qui enfonce son couteau aux jointures, et celui qui croise la laine sur le tissu. Une main de brute pour saisir l’immense, une main de fée pour saisir l’infime.
C’est l’ombre et la lumière.

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L’ombre et la lumière.

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Une pensée antique.

Entrée, Villa Kérylos, Beaulieu sur mer, gildalliere, 2019
Photo/Gilles Dallière/Péristyle/Villa Kérylos/Beaulieu sur mer

Dans la clarté d’une pensée antique, je contemple la mort de Talos après la conquête de la toison d’or. J’observe le retour d’Héphaïstos dans l’Olympe. Les scènes sont variées, mêlées de palmettes et de motifs conchyliologiques, évoquant les liens indéfectibles entre la civilisation grecque et le monde marin sur fond ocre jaune et rouge pompéien. Les lumières qui y traînent sont des lettres d’amour. Un amour qui ne demande rien, sinon d’être là. Un amour qui vous donne l’éternel, en passant. J’ai pris la liberté de regarder ces murs. De poser mon regard entre ces deux colonnes qui mènent à bien plus haut que moi : là où plus rien n’est à saisir, sinon l’insaisissable.

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Une pensée antique.

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Cadeau.

Détail, escalier du Majestic, Nice, gildalliere, 2019
Photo/Gilles Dallière/ Escalier du Majestic/Nice

Il faut donner à l’autre, ce qu’il attend pour lui, non ce que vous souhaitez pour vous. Car ce qu’il espère, ce n’est jamais ce que vous êtes, c’est toujours autre chose. J’ai donc appris très tôt à donner ce que je n’avais pas.

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Cadeau.

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Bleu acier

Le portillon des Hirondelles, Andrézieux, gildalliere, 2019
Photo/Gilles Dallière/Les Hirondelles/Andrézieux-Bouthéon

Aux Hirondelles, je choisis un arbre dans le parc, le séquoia où le cèdre bleu dont l’ombre me paraît suffisamment dense, et je m’assois. Le parc est vaste. Face à la terrasse, en contre-bas, la grande pelouse court jusqu’au bout d’une allé de platanes qui délimite un terrain qui descend sur la Loire. À ma droite, les bosquets étalés où arrondis des rhododendrons masquent les serres. À la nuit tombante, mon père rentre de l’usine. Au portillon de la villa la cloche sonne pour me faire rentrer. Il m’accueille à sa manière, maman à la migraine, et il parle peu. À longueur de journée, on remue toutes sortes de pensées, on en fait le tour et interminablement, on recommence, car les pensées ne se laissent jamais tout à fait pénétrer. Ce mutisme des choses, des raisons profondes des choses, conduit au silence, mais il suffit que ces choses aient été évoquées et leur impénétrabilité reconnue, il en demeure un reflet dans les yeux. En regardant ma mère monter dans sa chambre, le regard bleu acier de mon père est singulièrement perçant, lorsqu’il se pose, de fait, il se pose peu, il demeure tout fixé sur ce rêve intérieur poursuivi sans fin dans son usine.

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bleu acier

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Le vertige

Ombre et lumière, Andrezieux, gildalliere, 2019.
Photo/Gilles Dallière/Hôtel Best western/Andrezieux-Bouthéon

Andrézieux-Bouthéon. Trois ans déjà se sont écoulés depuis ce matin nuageux et venteux où j’ai enterré mon père. Face à la fenêtre, je me suis assis sur le lit de ma chambre d’hôtel. Il fait beau. L’idée d’aller seul me recueillir au fond de mes souvenirs est devenu une évidence. Ce village a vu naître les toutes premières images de mon enfance. C’est comme un rendez-vous. Depuis, en France on a voté pour le rassemblement national. On va donc se prendre la tête sur le problème des migrants, de la solidarité, du climat, de la fraude fiscale, du chômage, de la technocratie, des frontières, du Brexit, des libertés, de la culture, des lobbys, du glyphosate, de Macron, et du nationalisme en Europe. Mais le pire de ce week-end, c’est cet e-mail reçu de mon frère. J’ai éprouvé à sa lecture cette sorte d’assombrissement mental désensibilisant que suscite le spectacle d’une intelligence anémiée, repliée sur elle-même, emmurée dans une réclusion absolue. Il y a quelque chose de morbide dans ce « je » obsessif, et cette surabondance de mots stériles m’a donné le vertige.

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Le vertige

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Revenir à soi

Street photography, Bénares, Inde, 2008
Photo/Gilles Dallière

Les larmes me viennent aux yeux à la seule pensée de quitter les rives du Gange. En glissant silencieusement sur la dalle des morts, je l’ai trouvé là, sans femme, sans amis, sans famille, allongé à même le sol,dans les rides de sa face terreuse. Il tend sa jambe douloureuse comme une ombre noire alors que l’autre, repliée sur le clair livide de son dhoti, semble insensible à l’ocre jaune qui l’entoure. Le lit creusé du fleuve s’efface quand le soleil s’en mêle et au plus haut du ciel, ce qui n’apparaît pas ce découvre enfin. La main sans l’ongle, la bouche sans dents, l’œil sans l’œil mais le cœur avec le cœur.

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Revenir à soi

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