L’usage du monde
Photo/Gilles Dallière
Le long du Gange, dans ce palais ocre rouge, piqué de deux ou trois renflements de faïences bleues, c’est un matin comme tous les autres, un matin de mars. Hypnotisé par cette vibration rageuse, je suis ébloui par la fraîche pâleur des eaux sacrées. Ils sont là comme des oiseaux danseurs, ils viennent dépeupler le ciel de ses étoiles sur la géométrie poétique des ghats. C’est le moment où l’on perd pied, où la parole, soulevée par le fleuve devient prière. Ils viennent bien du pays où les couleurs ont cette couleur, celle dont la vie est si bien réglée que chaque jour ils peuvent consacrer quelque temps à leurs dieux.