TRY TO GET WHAT YOU LOVE OR YOU'LL BE FORCED TO LOVE WHAT YOU GET
Archives Mensuelles: août 2022
Le bar de tous les plaisirs…
Le bar d’Avlemonas, Kithira, Grèce, gildalliere, été 2022
Ce soir, dans ce petit bar, le bruit assourdissant et les lumières tournoyantes m’envahiront d’un sentiment d’irréalité. Cette fête deviendra un objet d’observation merveilleux, un grand kaléidoscope humain, entraîné par le même désir d’oublier, de se perdre.
La taverne Platanos, Milopotamos, Kithira, Grèce, gildalliere, été 2022
Je dois bien avouer que là, je suis malheureux. C’est une vraie carte postale, une œuvre d’art contemporain, pleine de couleurs qui servent à conforter tous les malentendus de la bourgeoisie. Et très vite, le bruit de la taverne vient briser ce cristal d’absence et apporte avec lui, la vulgarité, et la sueur.
Je ne peux pas le nier, je suis ici très proche du bonheur, protégé par le non-lieu, le non-espace, le non-temps d’une taverne créée pour un non-individu.
intérieur, Kato Hora, Kithira, Grèce, gildalliere, été 2022
L’ombre s’est figée sous l’immobilité du soleil au zénith, recueillie, pénétrable et accueillante comme une mère sans jugement. L’ombre rend spirituels les objets les plus banals. Le temps est ralenti et dehors, les fleurs blanches du Sophora du Japon tournent plus lentement dans l’air. L’ombre retient sa respiration, et les choses deviennent mesurables dans une balance qui n’est pas de ce monde.
La fenêtre de Natacha, Hora, Kithira, Grèce, gildalliere, été 2022
Je me suis adossé à un mur et je regarde la blancheur idéale du rideau. C’est vrai, je n’ai pas regardé mon visage dans le miroir. Je le contemple pourtant chaque matin et je cherche dans mon regard la marque prégnante de ce vide en moi, de ce manque qui me relie à l’enfance. Je regarde la fenêtre, je la considère dans toute sa beauté. Le rideau brodé qui vole au vent, est comme une page à écrire. Je vole dans mes pensées, je souris légèrement, et pour un temps, j’échappe au brouhaha de la rue.
Les palmettes d’une maison, Pitsinades, Kithira, Grèce, gildalliere, été 2022
Le décor est devenu une philosophie, depuis que le monde a perdu de son étrangeté, depuis que les forêts et les océans sont répertoriés, l’absence d’inconnu oblige à se construire un décor. Chacun, dans une illusion de moi, peut le configurer à son image. Des toiles peintes et des Himalaya de stuc s’offrent au désir et, enfermé dans ces ersatz comme dans un palanquin d’or, on peut traverser la vie et le monde, lesquels ont perdu toute saveur. Un décor pour se cacher le vide du sens, ou une porte pour retrouver le sens, qui n’a jamais été perdu. Et c’est vrai, ici il n’y a plus qu’un ciel et une bande-son de palmettes.
A l’ombre de mes amis, Agia Moni, Kithira, Grèce, gildalliere, été 2022
On croit se rapprocher du ciel en montant plus haut, mais on se rapproche de Dieu en se vidant de tout. Et puis il y a ce soleil qui refuse toujours les compromis. C’est alors que j’ai saisi Gilles plongeant Sylvie dans l’ombre de son intimité. Ils pensent à l’écume du ciel, et ils rêvent de sucre glace. Ils voudraient vivre dans la même fugacité, dans la même fragilité, mais sous ce soleil, qui n’est pas encore incliné sur son orbe, ils fixent le centre de la lumière pour s’y perdre.
Agia Moni, la Sainte-unique, Kithira, Grèce, gildalliere, été 2022
À la sortie du monastère d’Agia Moni, un rond-point marque la fin de ce lieu de perfection hiératique, à cette heure les voitures n’y tournent pas, mais il est dans sa spirale giratoire une manière d’interdire ; seul celui qui sait exactement à quel moment tourner pourra pénétrer la cité de l’immobilité luxueuse, jamais aucun hasard ne guidera une voiture vers cette allée de splendeur.
Atoll de Chytra, Kithira, Grèce, gildalliere, été 2022
Le ciel du midi, indemne et implacable, exige de moi une perfection qui n’est pas à ma mesure. Les nuages passent, ils tremblent, ils figurent évasivement, ils sont à peine présents. Ils sont ce qu’ils sont, presque rien, dissous par les vents, un songe de l’horizon, une distraction des dieux, sans impatience, sans amertume. Ils protègent Aphrodite la déesse de l’amour, du désir et de la beauté. La Femme-née-des-vagues fut portée par les Zéphyrs sur cette île.
Le parterre de fleurs du Sophora du Japon, l’arbre des pagodes, Kato Hora, Kithira, Grèce, gildalliere, été 2022
Je marche sur la terrasse et je regarde le sol au pied de l’arbre des pagodes, le Sophora du Japon centenaire qui devient mon refuge. Il frémit et vibre en propageant une liqueur subtile, le parfum même de l’été et de l’enfance, que ses fleurs doubles et collantes lancent dans l’air comme des libellules de sucre filé. L’ombre de l’arbre se perd sur le parterre de fleurs claires. Elles sont piquées d’insectes et de pollen. C’est comme un tourbillon d’étoiles et d’étincelles, les abeilles y tournent en cercles indécis, et dans un essaim de sucre, les petites fleurs blanches tournent sur elles-mêmes et diffusent un pollen à l’odeur lumineuse de pâtisserie vanillée. La lumière est faite d’une multitude de soleils épinglés, les feuilles réfléchissantes la morcellent en des centaines d’événements éblouissants.