La montée d’escalier 2 de la villa Alfonsa, le Dramont; Saint-Raphaël, gildalliere, automne 2021
C’est la même petite photo sans fards. De la fenêtre le ciel est vaste et noir, irisé de rayons de lumière intense. C’est la lumière du clair découpant l’obscur, du brillant scarifiant le mat, le dur zébrant le mou, lumière d’une irrépressible exigence de pureté.
La montée d’escalier de la villa Alfonsa, le Dramont; Saint-Raphaël, gildalliere, automne 2021
C’est une photo sans fards, un Rembrandt-Soutine sans peinture, une crucifixion sans croix. À peine (mais c’est l’à peine qui fait la force de l’image), peut-on lire ainsi tel détail de la rampe ou du sol en ciment, le tout surplombé par la croix que dessine la structure de la porte.
Vue du 1quai aux fleurs, Paris, gildalliere, hiver 2021
La ville s’étale. Elle est lourde, obscure et enrhumée. J’ai pris de la hauteur pour apercevoir le fond des brumes avec tous ses étages qui montent jusqu’au ciel. Les ponts se jettent par bonds à travers l’air jusqu’à l’azur fermé de fumée. De réverbère en réverbère, les quais glissent sur une eau trouble. Les façades se dessinent encadrant des rues où les gens marchent avec hâte, quand ils ne sont pas perchés sur des trottinettes et sous des écouteurs qui ne laissent aucune place à la poésie.
Comment s’ouvrir à la ville si nos comportements contemporains créent une barrière entre le monde vivant et le monde urbain ?
Vue de la terrasse du Cheval Blanc, Paris, gildalliere, automne 2021
Sur la terrasse du Cheval Blanc, la vie est un éclat de cristal et des nuages. Une veste oubliée, un changement de chambre, un foulard posé sur un dossier de chaise. Des souvenirs, un tas de livres que je n’ai pas eu le temps de lire. un sourire complice. Une envie lumineuse d’avancer.
Vue du balcon du centre Pompidou, Montmatre, Paris, gildalliere, automne 2021
De Montmartre au Centre Pompidou, je suis allé voir Georgia O’Keeffe, il y avait trop de monde et les peintures de fleurs toutes gorgées de couleurs, les paysages surréalistes et métaphysiques m’ont ennuyé. Il faut dire que je sortais de la formidable rétrospective de Georg Baselitz. Il y avait peu de monde et l’exposition m’a renversé. Une certaine fragilité émane de ses tableaux. Il y a de la violence, beaucoup de violence. Il y a du sexe, et plus on avance dans le temps plus il y a des rides, une peau tombante, des os saillants, des portraits à l’envers, des traits anguleux. Il y a de la couleur, beaucoup de couleurs, de la force, une vitalité incroyable. À la fin, Baselitz révèle le noir et le blanc. Néanmoins, là où certains voient dégénérescence, tristesse, maladie et mort, j’y ai vu de l’amour, de la tendresse de l’admiration et de la beauté.
Une idée qui devient obsédante est celle qui rassemble étrangement dans une seule phrase quelques mots complexes : équilibre, chimère, crise, élévation, libertinage, chaos, orientation, entraves, cohérence, attente, diversité, duo, intrusion, identité, coulisses, loyauté, racines. Par rapport à ma future exposition j’ai déjà un titre : « Clair/Obscur ». La première photo, « Racines », se reflète dans le verre sécurité gris qui protège la « Mauvaise graine » de Francisco Ruiz de Infante, un tirage numérique à trois exemplaires. Tout autour les céramiques sont chargées de mémoire.
Clair/obscur #01. « Racines », parc du Dramont, Var, France, automne 2021. Tirage Fine-Art, 70x70cm, sur papier Digigraphie 308g, encres pigmentaires. Passe-partout 3.3mm, 90x90cm. Cadre en bois noir 90x90cm. Verre anti-reflet, anti-UV à 92%. Tirage d’auteur, Gilles Dalliere La franche juxtaposition des branches sombres et claires de « Racines » s’affirme comme une esthétique en soi. Elle s’accorde à l’explosion graphique des noirs saturés et des blancs éclatants de la photo de Jean-Claude Gautrand de la série « Métalopolis » galerie W.
Clair/obscur #01. « Racines », parc du Dramont, Var, France, automne 2021. Tirage Fine-Art, 70x70cm, sur papier Digigraphie 308g, encres pigmentaires. Passe-partout 3.3mm, 90x90cm. Cadre en bois noir 90x90cm. Verre anti-reflet, anti-UV à 92%. Tirage d’auteur, Gilles Dalliere Je vois le soleil se lever. Le chêne s’étirer dans un remuement bruissant de branches rugueuses et de feuillage persistant. Je vois la lumière dérober l’ombre. Le ciel blafard semble fermer les yeux. Je vois les heures du jour cheminer à pas feutrés sur le sentier mouillé par la rosée du matin. Au loin, l’infini glisse sur le rivage vermeil de l’Estérel. Ici, nul besoin de prier, ce qui frappe, c’est ce halo de lumière qui cerne le mystère de nos vies.
Le salon des antiques, Grand Trianon, château de Versailles, gildalliere, automne 2021
Le temps est venu où, au bout de leurs tiges, les feuilles de l’automne frissonnent. Au sortir du jardin des Marronniers, face au Grand Trianon, l’Europe regarde l’amphithéâtre des antiques. Vingt et un bustes immobiles et muets posés sur des scabellons de marbre, transmettent les messages de propagande voulus par le roi Louis XIV. Tout autour, le parc est jalonné de points de vue surprenants et de lieux intimes. Un jardin animé par le mouvement des ombres des arbres soigneusement taillés, projetées sur les allées sablées.
Le péristyle, Grand Trianon, Versailles, gildalliere, automne 2021
Ouvert entre cour et jardins, le péristyle du Grand Trianon pèse sur une terre figée d’histoire, et cette rigidité saisie à la lumière du roi soleil, transforme les marbres roses et blancs en pierres transparentes jusqu’au plus profond de ses profondeurs enflammées. Les colonnades retrouvent leur souffle, comme un râle minéral implore le courant d’une existence pétrifiée par l’ombre de Jules Hardouin-Mansart. La transparence attise la poussière du gravier sablonneux des allées à la française et l’ombre desséchée de quelques graminées argentées projette d’ores et déjà les rigueurs de l’hiver.